Congrès :Déceptions légitimes ou méprise ? Candidature en filigrane…
Lemandatexpress – Le président de la République s’est adressé, pour la quatrième fois, au Parlement réuni en Congrès. Alassane Ouattara n’a pas dérogé à l’esprit et à la lettre de ce rendez-vous institutionnel. Pourtant, des voix se sont élevées, attaquant vertement son discours. Que faut-il en déduire ? Devrait-il absolument faire des annonces attendues ? Quid de sa candidature ?
Il était attendu, il s’est présenté, il s’est exprimé. Un peu plus de trois quarts d’heure de prise de parole. Devant le Parlement réuni en Congrès, au Sofitel Ivoire hier, mardi 18 juin, le président de la République, SEM Alassane Ouattara, a égrené l’état de la nation et dressé le bilan des réalisations du gouvernement. Département par département, il a mis en avant les avancées notables sur le plan économique, social et politique. Une approche méthodique et détaillée qui montre une Côte d’Ivoire en pleine transformation, engagée sur la voie du développement.
Cette bonne santé socio-économique de l’État n’a pas échappé à une grande partie de la presse locale qui magnifie, la prestation du chef de l’exécutif. Le Matin salue « un bilan robuste et inattaquable ». « Que de progrès sous Ouattara depuis 2011 ! », s’exclame Le Rassemblement, tandis que Le Mandat résume que « Ouattara rassure sur l’état de la nation ». En effet, comme l’a dit la présidente du Sénat, Kandia Camara, « avec Ouattara, c’est un développement inclusif ».
Les accomplissements mentionnés, notamment les succès économiques et les initiatives sociales, reflètent une volonté de consolider la stabilité et de promouvoir la croissance. C’est à juste titre d’ailleurs qu’au terme de son adresse, Alassane Ouattara, tout en promettant l’annonce « d’autres questions la prochaine fois », a réaffirmé son engagement en faveur du développement de la Côte d’Ivoire. « Ma vision pour notre pays reste inchangée. Il s’agit de faire de la Côte d’Ivoire une nation unie, une Côte d’Ivoire prospère, une Côte d’Ivoire solidaire en un mot. Pour y arriver, nous devons œuvrer à la consolidation des importants acquis enregistrés en matière de développement économique et social, de maintien de climat de paix, de sécurité et de cohésion sociale », a-t-il exhorté.
De fait, le chef de l’État était dans son élément. Il a fait, comme l’exige cet exercice institutionnel, le bilan des réalisations concernant l’économie, la santé, l’éducation, les infrastructures, etc. Peut-être devrait-il en dire davantage, en faisant des annonces chocs ! C’est ce qu’espérait, en tout cas, l’opposition dans son ensemble. Que non.
In fine, Alassane Ouattara n’a pas abordé certaines questions politiques brûlantes, telles que sa candidature pour les prochaines élections et les cas de Laurent Gbagbo, Blé Goudé et Soro Guillaume. Cette omission a suscité des réactions mitigées parmi les parlementaires, certains exprimant de la déception face à l’absence de réponses sur des questions politiques importantes. Des journaux se font, d’ailleurs, l’écho de ces frustrations. Notre Voie titre à sa une : « Déception à tous les étages », Le Sursaut estime qu’Alassane Ouattara « rafistole les bilans de ses ministres » ; Dernière Heure souligne, pour sa part, que « Ouattara dribble tout le monde sur sa succession ».
Il est évident que l’enjeu de la prochaine présidentielle est dans toutes les têtes avec ses sujets sous-connexes touchant aussi bien l’opposition que la majorité. Mais le président de la République était-il tenu de s’étaler sur ces questions hier devant le Congrès ? N’a-t-il pas promis de faire d’autres annonces par la suite ? L’opposition, qui a tiré à boulets rouges sur le chef de l’État, aurait bien voulu que cette tribune soit celle de la catharsis pour toutes les préoccupations politiques. « Je suis venu avec deux préoccupations, la première était de savoir si le président Laurent Gbagbo, conformément à la loi, pourrait être candidat comme il le souhaite. Et la deuxième, c’était de savoir si, comme ses frères africains, le président Alassane Ouattara voudrait encore faire un 3e, un 4e mandat. Sur ces deux points, je n’ai pas eu de réponse. J’avoue que je suis déçu et je suis resté sur ma faim », a martelé Michel Gbagbo, député PPA-CI de Yopougon. Le moment était-il le plus indiqué ?
Certains contempteurs et analystes rappelleront l’adresse de mars 2020 au cours de laquelle le chef de l’État annonçait sa non-candidature au scrutin présidentiel d’octobre 2020. Mais comme le dit l’adage « comparaison n’est pas raison ». Le contexte de 2020 n’est pas celui de 2024. Alors ces expressions de déception pourraient s’apparenter à une méprise.
Manifestement, la question de savoir si Alassane Ouattara sera candidat ou non reste ouverte. Sa décision aura un impact significatif sur le paysage politique ivoirien. Une éventuelle candidature pourrait renforcer la continuité des politiques actuelles, tandis qu’un retrait ouvrirait la voie à une nouvelle dynamique politique, avec des implications pour les alliances et les stratégies des différents acteurs politiques.
En toute objectivité, au regard du satisfecit marqué devant les réalisations de son gouvernement, et l’appel constant de son camp, Alassane Ouattara est plus proche d’une candidature qu’un renoncement. Quid des cas Gbagbo, Blé Goudé et Soro ? Ces questions ne manqueront pas de revenir sur le tapis après cette réunion du Congrès.
Martial Galé