
Présidentielle au Gabon : Oligui Nguema remporte le scrutin avec 90,35 % des voix, une nouvelle page pour le Gabon
Lemandatexpress – Le chef de la transition gabonaise, Brice Oligui Nguema, a remporté l’élection présidentielle de samedi avec 90,35 % des voix, selon les résultats provisoires publiés aujourd’hui par le ministère de l’intérieur du pays.
Sa victoire électorale consolide son emprise sur le pouvoir près de deux ans après le coup d’État contre l’ancien président Ali Bongo.
« M. Brice Clotaire Oligui Nguema est élu [président] à la majorité absolue des suffrages exprimés, avec 575 222 voix », a annoncé le ministre de l’intérieur, M. Hermann Immongault.
Il est suivi par son principal adversaire, l’ancien Premier ministre Alain Claude Bilie-by-Nze, qui a servi sous le régime Bongo et qui a obtenu 3,02 % des voix.
Les Gabonais se sont rendus massivement aux urnes pour élire leur président, lors d’un scrutin historique marqué par l’absence de la dynastie Bongo, une première depuis 1967.
C’est un tournant historique qu’a vécu le Gabon ce dimanche 13 avril 2025. Pour la première fois depuis près de soixante ans, l’élection présidentielle s’est tenue sans un membre de la famille Bongo en lice. Un scrutin sous haute attention, tant sur le plan national qu’international, qui a consacré le général Brice Clotaire Oligui Nguema, chef de la transition militaire, avec un score écrasant de 90,35 % des voix dès le premier tour, selon les résultats provisoires annoncés par le ministère de l’Intérieur.
Ce résultat, sans réelle surprise, vient confirmer l’hégémonie politique du général, arrivé au pouvoir en août 2023 à la suite d’un coup d’État contre Ali Bongo Ondimba, dont le règne familial avait débuté en 1967 avec son père, Omar Bongo.
Une campagne « bal poussière », une victoire écrasante
Malgré une campagne électorale marquée par un ton festif et populaire, parfois comparé à des “bals poussière” dans les quartiers, la victoire d’Oligui Nguema n’a laissé place à aucune incertitude. L’ancien patron de la Garde républicaine, devenu chef du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), s’est présenté comme l’homme providentiel, garant de l’ordre, de la stabilité et de la refondation du pays.
Après 19 mois et 13 jours de transition militaire, Oligui Nguema succède donc à lui-même en tant que président élu, pour un mandat de sept ans. Il prend officiellement la relève de la transition et de l’ancien président Ali Bongo, dont il fut pourtant un proche collaborateur.
Une rupture dans la continuité ?
Si le général Oligui Nguema promet une rupture avec les pratiques du passé, le contenu réel de cette rupture suscite le scepticisme. L’entourage du président élu reste fortement marqué par des figures du défunt Parti démocratique gabonais (PDG), recyclées dans le nouveau Rassemblement des bâtisseurs, un parti conçu comme sa machine électorale. Les commissions électorales et les structures de campagne avaient d’ailleurs des allures de continuité avec l’ancien régime.
De nombreuses voix critiques dénoncent un simple changement de façade : le système Bongo serait tombé, mais ses méthodes et ses hommes resteraient bien en place. Le culte de la personnalité persiste, porté par une caste de “kounabelistes”, ces fidèles opportunistes toujours prêts à flatter le chef.
Le passé du général Nguema, bien que militaire et formé dans l’ombre du système Bongo, n’est pas sans polémique. Des enquêtes de l’OCCRP (Organized Crime and Corruption Reporting Project) ont mis en lumière des achats immobiliers suspects aux États-Unis entre 2015 et 2018, effectués en liquide pour plusieurs millions de dollars. Des accusations jamais réellement traitées par la justice gabonaise, mais qui continuent d’alimenter les soupçons.
L’avenir du Gabon entre espoir et vigilance
Ce scrutin restera comme un moment historique, celui d’une ère sans Bongo. Mais il soulève aussi une question centrale : Le Gabon a-t-il vraiment tourné la page de l’autoritarisme dynastique ou assiste-t-on à une nouvelle version du même système, avec un visage militaire ? Le peuple gabonais, qui s’est déplacé massivement aux urnes, attend désormais des actes concrets de rupture, et non des promesses creuses.
Le général Oligui Nguema a sept ans pour prouver que le changement ne s’arrête pas au nom du président, mais qu’il touche enfin le cœur du pouvoir.
Izoudine Youssef avec RFI et BBC