
Levée des sanctions contre Jean-Louis Billon et Yapo Valérie : Pourquoi Tidjane Thiam a versé de l’eau sur le sable…
Lemandatexpress – La cohésion tant recherchée au PDCI-RDA n’est certainement pas pour demain. Malgré la levée des sanctions par Tidjane Thiam, les tensions persistent, au point que le grand conférencier Gnamien Yao a dû supplier, littéralement, Yapo Valérie.
C’est une action d’éclat qui aurait pu connaître un meilleur couronnement. Et pourtant, les attentes sont totalement déçues. Six jours après la levée des sanctions contre les militants à l’initiative du président Tidjane Thiam, l’atmosphère au sein du PDCI reste marquée par des revendications. Signe que le président a posé un acte sans véritable impact a posteriori.
Jean-Louis Billon et Yapo Valérie, qui bénéficient, comme bien d’autres militants, d’une totale absolution depuis le 26 mars, demeurent en rupture avec la démarche de l’ancien patron du Crédit Suisse. Le premier poursuit ses activités de terrain, en adéquation avec sa ligne de départ et ses ambitions pour la présidentielle d’octobre prochain. Jean-Louis Billon était dernièrement à Yopougon, où il a présenté un pan de son projet de société.
De plus, selon des indiscrétions, il aurait demandé au Conseil de discipline du PDCI la date de sa comparution. Une démarche d’autant plus surprenante que les plaintes contre lui ont été abandonnées.
Quant à Yapo Valérie, alors visée par une suspension temporaire du Bureau politique, elle est loin d’adouber la décision en faveur de sa réintégration dans cet organe crucial du parti. Plus encore que Jean-Louis Billon, l’ex-déléguée départementale d’Akoupé est celle qui trouble le sommeil du PDCI.
Une nouvelle requête
Son audience devant le juge des référés, vendredi 28 mars, a fait grand bruit. L’objet de sa plainte initiale ayant été réglé par les mesures de Tidjane Thiam, Yapo Valérie a introduit une nouvelle requête : la suspension du président du parti ainsi que de tous les organes qu’il a mis en place. Selon elle, Thiam ne jouit pas de la légitimité nécessaire pour conduire les rênes du vieux parti. Le verdict de l’affaire est attendu le mercredi 2 avril.
C’est une question qui, en réalité, ne peut être tranchée en référé, souligne un cadre du PDCI-RDA, estimant que le juge devrait se déclarer incompétent à rendre une décision. Dès lors, tout porte à croire que les parties pourraient être suspendues à la date du 24 avril, pour l’audience ordinaire consécutive à l’assignation du 11 mars.
Que vaut finalement le geste d’apaisement posé par Tidjane Thiam ? « Cette décision permet de comprendre qu’en réalité, les agissements des uns et des autres n’étaient pas la conséquence des sanctions prises par le Conseil de discipline. C’était juste un alibi pour fragiliser et désorganiser le PDCI », analyse un autre cadre qui vit très mal ces péripéties.
Cette procédure était morte…
En clair, alors qu’il croyait calmer les tensions en amnistiant les militants, Thiam semble avoir juste donné des perles aux cochons. Et cela s’est vérifié lors de son passage sur TV5, lundi dernier. « Dans un esprit d’apaisement, je me suis dit qu’il valait mieux supprimer cette sanction et permettre à cette personne d’aller au Bureau politique », a-t-il expliqué.
Il a poursuivi en des termes qui trahissent son agacement : « On nous demande quand même de continuer cette procédure le 2 avril. Pour nous, cette procédure était morte, puisque l’objet du litige était qu’elle puisse assister à la réunion (…) On nous dit qu’elle a changé sa demande, ce qui, selon nos avocats, n’est pas conforme à la loi. Elle a formulé une nouvelle série de requêtes pour exiger que je sois démis de ma fonction et qu’un administrateur provisoire soit nommé. »
Plaidoirie de Gnamien Yao
Avant lui, Dr Gnamien Yao, vice-président et grand conférencier au sein du parti doyen, a presque supplié Yapo Valérie de renoncer à son action en justice et de réintégrer sa famille politique.
« Au nom de la fraternité qui nous lie depuis un quart de siècle, nous qui savons comment tu as gravi les échelons dans le PDCI-RDA, notre Grand Parti, nous te demandons humblement pardon. Nous te prions de revenir à la Maison commune, le PDCI-RDA, où t’attendent à bras ouverts tes compagnons de lutte, avec des cœurs emplis d’amour, de tolérance et de pardon. Ensemble, entonnons l’hymne si cher aux Présidents Félix Houphouët-Boigny et Henri Konan Bédié, ainsi qu’à leur digne successeur, le Ministre Tidjane Thiam, à savoir : ‘’Le linge sale se lave toujours en famille, et il ne faut jamais indiquer la porte de sortie à un membre du PDCI-RDA, quels qu’en soient les motifs.’’ »
À la lumière de cette plaidoirie, il apparaît clairement que Yapo Valérie constitue, à l’état actuel des choses, une véritable menace pour le PDCI-RDA et son président. Contrairement aux quatre secrétaires de section dont la plainte, vide de substance, avait été rapidement classée sans suite, son assignation du 11 mars risque d’entraîner le PDCI dans un long bras de fer judiciaire. Avec, pour conséquence, la mise à mal de ses activités. Un militant de la commune d’Abobo craint à juste titre que le Bureau politique du 5 avril ne puisse se tenir à la date indiquée.
Textes permissifs
Le contexte actuel du PDCI n’est pas sans rappeler les événements qui ont précédé le congrès extraordinaire du 22 décembre 2023. À l’époque, deux secrétaires de section de Yopougon (Christophe Blesson et Mathieu Affroumou Ourah) avaient, par voie de justice, obtenu dans un premier temps la suspension de ces assises, avant de faire profil bas à la suite de tractations. Qu’en sera-t-il de la démarche de Yapo Valérie ? La question reste posée.
À vrai dire, soutient un militant, l’occurrence de tels agissements est favorisée par les textes mêmes du parti, qui sont, selon lui, trop permissifs. Aucun quorum n’est exigé pour une quelconque saisine ou pétition. Un membre, quel qu’il soit, peut traduire le PDCI en justice, déplore-t-il. Dès lors, Tidjane Thiam peut amnistier autant de fois qu’il le veut, mais tant que les dispositions textuelles resteront en l’état, ce sera comme s’il versait de l’eau sur le sable. Une peine perdue.
Martial Galé