
Présidentielle 2025: Alassane Ouattara-Tidjane Thiam, bataille à distance entre deux adversaires potentiels aux parcours similaires…
Lemandatexpress – L’un est président sortant. L’autre un opposant très remuant qui porte les espoirs du PDCI-RDA. Rien ne dit, cependant, s’ils seront face à face dans 8 mois. Qu’à cela ne tienne, Alassane Ouattara et Tidjane Thiam sont deux technocrates aux parcours similaires, qui se livrent une bataille à distance en vue de la Présidentielle 2025.
À huit mois de l’élection présidentielle, le RHDP, d’Alassane Ouattara, et le PDCI, de Tidjane Thiam, se scrutent dans la perspective d’un possible affrontement dans les urnes.
Deux générations, deux styles, deux camps et une question : Alassane Ouattara, 83 ans, et Tidjane Thiam, 62 ans, s’affronteront-ils lors de la présidentielle du 25 octobre 2025 ? Tandis que le premier n’a pas encore dit s’il entendait ou non être candidat à un nouveau mandat, le second se prépare déjà activement à l’échéance électorale.
Transfuges
Un peu plus d’un an après avoir pris les rênes du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), l’ancien patron de Prudential, puis de Credit Suisse, a tenu mi-février son premier grand meeting à Abidjan, quelques jours après avoir annoncé son intention de renoncer à la nationalité française, une condition préalable obligatoire pour qu’il brigue la magistrature suprême. Il devrait être désigné pour représenter sa formation lors d’une convention dont la date reste à définir, face à Jean-Louis Billon, qui n’a jamais fait mystère de ses ambitions présidentielles.
Le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) multiplie de son côté les initiatives en faveur de la candidature d’Alassane Ouattara, son « candidat naturel », qui s’est récemment déclaré « en pleine santé et désireux de continuer à servir [son] pays ». Une déclaration qui a ravivé les espoirs de ses soutiens, tous convaincus qu’il est le seul à pouvoir garantir la victoire de son camp et maintenir la stabilité du pays dans une région en plein bouleversement.
À huit mois du scrutin, les deux partis, longtemps alliés – Bédié a soutenu Ouattara lors de la présidentielle de 2010, puis en 2015, avant de sortir du parti unifié en 2018 –, se jaugent à distance. Thiam en est convaincu, le PDCI est en capacité de retrouver le pouvoir acquis en 1995 et perdu en décembre 1999 après le coup d’État qui a balayé l’ancien président Henri Konan Bédié.
Vieille machine politique fondée en 1946, l’ancien parti unique a tenu bon après le décès de Henri Konan Bédié, en août 2023, malgré des querelles internes de leadership et des tensions qui perdurent encore aujourd’hui avec une procédure judiciaire en destitution intentée le 18 février par quatre plaignants contre Thiam. Mais le PDCI, certes très bien implanté dans le pays, a accusé un net recul ces dernières années face au camp présidentiel. Le parti au pouvoir a en effet conquis de nouveaux territoires traditionnellement acquis à l’opposition lors des dernières élections locales.
Le PDCI a par ailleurs perdu de nombreux cadres influents, des transfuges qui ont choisi de rester au RHDP au moment du divorce, comme Patrick Achi, l’actuel Premier ministre, Robert Beugré Mambé, Kobenan Kouassi Adjoumani, Jeannot Ahoussou-Kouadio, Narcisse N’Dri et bien d’autres.
Houphouëtistes
Adversaires politiques, Thiam et Ouattara ont néanmoins quelques points communs. Leur parcours à l’international, d’abord. Avant de s’engager en politique, Alassane Ouattara a fait carrière au FMI et à la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Thiam, diplômé de l’École polytechnique et de l’École des mines de Paris, qui fut à la fin des années 1990 directeur du Bureau national d’études techniques et de développement (BNETD), puis ministre du Plan et du Développement, a évolué dans les hautes sphères mondiales de l’économie et de la finance.
Surtout, tous deux revendiquent l’héritage de Félix Houphouët-Boigny, dont il a été beaucoup question lors de leur unique rencontre publique, le 11 mars dernier. « Nous sommes des partis houphouëtistes et nous devons œuvrer ensemble pour continuer à guider la Côte d’Ivoire sur le chemin du développement et de la paix », avait déclaré le nouveau patron du PDCI, petit-neveu du père de l’indépendance.
« Le PDCI est un parti auquel je suis particulièrement attaché […], avec lequel le RHDP a des relations fortes, qui porte la même philosophie, la même vision pour une Côte d’Ivoire en paix, c’est-à-dire stable et prospère. Le président Thiam va beaucoup lui apporter », lui avait répondu le chef de l’État.
Un scénario inédit ?
Cette revendication commune avait un temps fait naître l’idée d’une option, rapidement balayée d’un revers de la main d’un côté comme de l’autre : et si Alassane Ouattara transmettait le témoin à…Tidjane Thiam ? Impossible aujourd’hui d’imaginer un tel scénario. Les deux hommes ne s’apprécieraient guère. Au RHDP, on s’agace d’un Tidjane Thiam qui serait déconnecté des réalités du pays après plus de deux décennies vécues hors de Côte d’Ivoire, tandis que, au PDCI, on s’insurge contre un président qui s’accrocherait coûte que coûte au pouvoir, qu’il détient depuis 2011.
Si le chef de l’État annonçait sa décision de ne pas se représenter, la Côte d’Ivoire vivrait une élection présidentielle inédite, sans les trois grandes figures politiques historiques qui se sont partagé le pouvoir depuis l’indépendance. Candidat déclaré mais inéligible en raison d’une condamnation judiciaire, l’ancien président Laurent Gbagbo est, pour le moment, hors-jeu. Il a néanmoins appelé à une union de l’opposition face au RHDP, un appel auquel le PDCI n’a pas encore répondu.
Source : Jeune Afrique
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