
PDCI-RDA : Acculé de toutes parts, Tidjane Thiam, le début de la fin ?
Lemandatexpress – Tidjane Thiam vit des jours très mouvementés. Les plaintes s’enchaînent contre le président du PDCI-RDA, qui reste, par ailleurs, suspendu à l’issue de son processus de renonciation à la nationalité française. Ça craint pour le Bureau politique maintenu à la date du 5 avril.
C’est Jean-Louis Billon, candidat déclaré à la présidentielle d’octobre prochain, qui constituait jusque-là le farouche adversaire de Tidjane Thiam au sein du PDCI-RDA. Mais alors qu’il croyait si bien faire en annonçant, le 7 février dernier, son engagement à renoncer à sa nationalité française – condition pour briguer la présidence de la République –, le successeur de Bédié se voit acculé de toutes parts. Et qui plus est, de l’intérieur. Au point de susciter des doutes sur son avenir politique, notamment ses ambitions présidentielles à la tête de la Côte d’Ivoire.
De fait, comme s’il était soudainement rattrapé par son passé, après cette annonce, les griefs se concentrent plus que jamais sur Tidjane Thiam. C’est le cas notamment des quatre secrétaires de section, qui ont assigné le PDCI-RDA à comparaître le jeudi 27 février 2025 devant le Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau, « pour s’entendre ordonner la destitution de Tidjane Thiam du poste de président du PDCI-RDA, avec effet immédiat. »
Code de nationalité ivoirienne
Certes, la direction du parti n’a pas tardé à réagir à cette plainte, prétendant qu’il s’agit d’une manœuvre politique savamment ourdie. Aussi, Me Blessy Chrysostome, l’avocat-conseil de la formation doyenne, soutient-il que l’assignation à destitution n’est pas prévue dans les textes du PDCI-RDA. Sauf que la situation de Thiam, selon plusieurs militants, prend des proportions telles qu’elle mérite une attention particulière. Et ce, au regard de la Constitution ivoirienne.
Yapo Valérie a décidé d’enfoncer cette porte grandement ouverte. Sous le poids d’une suspension temporaire, l’ex-déléguée départementale d’Akoupé, qui était face à la presse ce mercredi 19 février, a d’abord rejeté en bloc cette sanction prononcée par le Conseil de discipline – qu’elle juge « fantoche et illégale » –, avant de s’attaquer au cas précis du président Thiam. « En effet, a-t-elle rappelé, l’article 55 de notre Constitution stipule que “le candidat à l’élection présidentielle doit être exclusivement de nationalité ivoirienne, né de père ou de mère ivoirien d’origine”. » Ajoutant : « Le président Tidjane Thiam ayant acquis la nationalité française, il a perdu sa citoyenneté ivoirienne conformément au Code de la nationalité ivoirienne, qui stipule en son article 48 ceci : “Perd la nationalité ivoirienne, l’Ivoirien majeur qui acquiert volontairement une nationalité étrangère ou qui déclare reconnaître une telle nationalité”. »
“Un citoyen français qui dirige le PDCI”
Dès lors, pour cette militante très révoltée, la démarche récente du président du PDCI-RDA en matière de renonciation à la nationalité française est sans équivoque. C’est la preuve, selon elle, que « M. Tidjane Thiam demeure un citoyen français, et il dirige le PDCI en tant que Français seulement d’origine ivoirienne. Ce n’est pas possible ! » Autrement dit, « c’est un Français qui a été élu à la tête du parti », renchérit-elle.
Pourtant, comme rappelé par Yapo Valérie dans sa déclaration, « des voix, et non des moindres, proches de lui (Thiam), des dignitaires du PDCI-RDA ont rassuré les militants et l’opinion en général qu’il n’avait aucun problème d’éligibilité, encore moins de nationalité, car tout était réglé ». Ce qui vaut, selon la jeune dame et ses pairs, la destitution du président élu du PDCI.
Par ailleurs, les signataires de la déclaration de ce mercredi 19 février ont dit porter plainte :
- Contre M. Tidjane Thiam pour tromperie sur sa nationalité, corruption morale, violation des textes du PDCI-RDA et duperie envers les congressistes qui l’ont élu
- Contre la direction par intérim d’alors du PDCI-RDA, le collège des vice-présidents d’alors et le comité électoral pour corruption morale, complicité grave portant atteinte à l’honorabilité du parti.
- Pour l’annulation pure et simple du congrès électif de décembre 2023 et de tous les actes de ce congrès frappé d’irrégularités sur la base des aveux faits par M. Tidjane Thiam, le président illégalement élu.
Une cocotte-minute
D’évidence, le PDCI-RDA et son président ne sont pas au bout de leurs peines. Ces levées de boucliers qui s’amoncellent au fil des semaines s’apparentent, à y voir de près, à une cocotte-minute qui ne présage rien de bon, sinon une éventuelle implosion qui sonnerait le glas de l’enfant prodige.
C’est au cœur de ce « brasier » que le porte-parole du PDCI-RDA, l’honorable Soumaïla Bredoumy, a confirmé hier la tenue du Bureau politique à la date du 5 avril. Ce sera le premier du genre sous Tidjane Thiam. Ira-t-il à ces assises de la plus haute importance avec ce postulat de double nationalité ? Tout porte à le croire. Car, comme l’a rappelé le juriste indépendant KAD, la procédure de renonciation à la nationalité française est longue, complexe et sa finalité incertaine. Celui-ci avance d’ailleurs que celle de M. Jean-Louis Billon, par exemple, lui a pris au moins deux ans.
Mais ce ne sera pas sans conséquence. En effet, il est fort probable, en l’état actuel des choses, que la question de l’éligibilité domine les débats et que tout parte en cacahuète. Ils n’ont donc pas tort, ceux qui pensent que ce Bureau politique s’annonce sous haute tension.
Martial Galé