Yasmina Ouégnin (députée PDCI) :”Il appartient au peuple ivoirien, d’apprécier ou non de donner un quatrième mandat au régime actuel”.
Lemandatexpress – Dans un entretien accordé au quotidien Le Nouveau réveil, l’honorable Yasmina Ouégnin, députée de Cocody et membre de la Commission Économique Sociale et Culturelle du PDCI-RDA en charge de la Commission «Pauvreté rurale, Pauvreté urbaine et Emploi des jeunes » au sein du Groupe de Travail « Economie et équité », s’est exprimée sur la vie du parti du doyen, la CEI et la présidentielle 2025. C’était en marges des 2es Assises de la jeunesse du PDCI-RDA, tenues du 06 au 08 septembre 2024 à Yamoussoukro.
Madame la députée, vous avez pris part aux dernières Assises de la jeunesse de votre parti le PDCI-RDA, quel sens donnez-vous à cet évènement ?
La jeunesse, nous le savons, représente l’avenir de notre pays, et au sein de notre parti, les jeunes veulent être écoutés et très bien entendus dans le débat concernant la vie et les projets du PDCI-RDA, mais la jeunesse est également attendue au niveau de l’implication et la contribution au triomphe de la cause de notre famille politique. Ces IIes Assises de la jeunesse ont donc offert un cadre permettant aux jeunes de se faire entendre par la Direction du PDCI-RDA, mais aussi d’apprécier les attentes du parti au regard de leur engagement militant. Je pourrais donc dire qu’il s’agissait de savoir quel PDCI-RDA nous voulons pour la jeunesse et quelle jeunesse nous voulons pour le PDCI-RDA ?
Immédiatement après son élection à la tête du PDCIRDA, le président Tidjane Thiam a entrepris des réformes dans le fonctionnement du parti. Quel jugement faites-vous de ces initiatives ?
Je n’ai aucun jugement à porter sur les réformes initiées par le président Thiam. Je pense qu’il nous faut simplement nous dire que ces réaménagements structurels et organiques épousent la vision qui est la sienne et qu’il a déclinée à l’occasion du Congrès extraordinaire électif de décembre dernier. Bien sûr, comme l’ensemble des militants, je me réjouis de son ambition de moderniser le parti et de revoir ses principes de fonctionnement.
Cette offre de gouvernance du président Thiam a été très bien accueillie en son temps par la grande majorité des congressistes qui l’ont alors plébiscité à la tête du parti. Les récents réajustements dont vous parlez semblent être un début de traduction en actions des promesses électorales qu’il a eu à faire.
Vous êtes une personnalité que l’on identifie au nombre des jeunes du parti, pourtant vous êtes une élue depuis maintenant treize ans, en plus d’être l’une des rares femmes de votre génération à être très active sur la scène politique. Pensez-vous être encore utile au PDCI-RDA ?
C’est vrai que j’ai été élue, il y a plus d’une décennie aujourd’hui, mais j’ai le double avantage d’une proximité générationnelle qui me permet d’échanger régulièrement avec les jeunes du parti et de comprendre leurs aspirations et d’une longévité dans le service actif politique qui a instauré un contact permanent avec nos aînés et doyens, du fait des responsabilités que j’assume tant au sein du parti, qu’au niveau de l’Assemblée nationale. Ceci dit, c’est à la Direction du parti qu’il revient d’apprécier l’utilité d’un militant au regard de la valeur ajoutée des actions qu’il mène ou pourrait mener pour le bien de notre famille politique. Pour ma part, je m’évertue à toujours apporter ma modeste contribution en donnant le meilleur de moi-même chaque fois que le devoir militant l’exige, et chaque fois que les actes sont posés, conformément aux textes et aux valeurs démocratiques qui doivent imprégner toute initiative de notre parti.
D’aucuns parlent de votre retrait dans l’animation et la vie du PDCI-RDA, si ce n’est votre ambition à vous mettre en situation de candidate à la présidentielle de 2025, quels commentaires avez-vous à ce sujet ?
Mais pourquoi diantre, devrais-je être en retrait ? Mon « PDCIisme » ne souffre aucun doute… Laissons donc jaser ceux et celles qui sont à la recherche d’effets de manche, laissons les oisifs prospérer dans des débats de salon… Il faut de tout pour faire un monde !! Pour ma part, je reste toujours active, engagée et déterminée. Nous le savons tous, en politique comme ailleurs, l’efficacité de certaines actions repose sur la discrétion. Les conclusions des travaux de la Commission « Pauvreté rurale, Pauvreté urbaine et emploi des Jeunes » dont j’ai la charge au sein du Groupe de travail « économie et équité », mis en place par le président du parti, sont très attendues. Mes camarades militants et moi travaillons d’arrachepied depuis plusieurs mois, en vue de suggérer les orientations qui pourraient être prises aux fins d’adresser les préoccupations des jeunes ivoiriens, tant en milieu urbain que rural. L’atelier sur l’Insertion professionnelle que je viens d’animer à Yamoussoukro aura également permis d’examiner des problématiques spécifiques qui appellent de la part de notre parti des réponses innovantes et durables dès notre avènement au pouvoir.
En tant qu’élue de la Nation, on vous a toujours sentie auprès des populations lorsqu’elles sont éprouvées. Aujourd’hui, quelle est votre opinion sur ces vastes déguerpissements engagés par le ministre gouverneur du District d’Abidjan qui mettent les populations dans un état de désolation totale ?
Je demeure très sensible au profond désarroi des populations impactées par ces opérations de déguerpissement, et je les assure de ma sincère compassion et de mon soutien moral. Je suis profondément peinée par tout ceci, car même s’il est certain que Abidjan a un grand besoin de réaménagements en conformité aux normes d’urbanisme, et que ceux-ci induisent d’importants investissements au niveau des infrastructures, force est de constater que la dimension humanitaire de leurs exécutions est absolument ignorée et cela soulève de sérieuses préoccupations sociales. Il nous revient, en outre, que dans de nombreux cas, le processus mis en œuvre pour l’indemnisation des personnes affectées par ces projets, demeure sinon opaque, du moins incompris par les populations-cibles. Pour moi, tant que ces initiatives de déguerpissement s’appuient sur des projets préalablement étudiés et restent encadrées par les textes, ces opérations revêtent incontestablement un caractère d’utilité publique. Toutefois, il y a de nombreux points à revoir absolument, afin que les déguerpissements n’entraînent plus la désolation à laquelle malheureusement nous assistons tous.
Il est de plus en plus question de réforme de la CEI. Quel est votre avis en tant que député sur la crédibilité de la CEI qui est décriée aujourd’hui ?
Écoutez, je compte au petit nombre de voix à avoir décrié en tant que députée, à plusieurs reprises, ces dix dernières années, la configuration et le fonctionnement de la Cei. Souvenons-nous qu’en 2013, j’ai ouvertement contesté auprès des juridictions compétentes, la pertinence du projet de loi relatif à la Commission électorale, en relevant plusieurs insuffisances qui aujourd’hui sont soulignées çà et là. En l’état actuel des choses, je vais plus loin, en disant que ma conviction est faite depuis bien longtemps, quant à une réforme du processus électoral dans sa globalité, considération prise d’un certain nombre d’exigences.
Celles-ci sont relatives à la revue pertinente de la liste électorale, au découpage des circonscriptions sur des bases objectives afin de garantir une véritable représentation des populations, et à l’accès équitable aux médias publics, pour ne citer que ces points majeurs. Tous les observateurs sont d’avis que des réformes profondes sont nécessaires pour l’avènement d’une structure essentielle à l’expression du suffrage, afin de donner du relief à notre démocratie.
Que pensez-vous d’un 4ème mandat du président Alassane Ouattara, à la présidentielle de 2025, pendant que l’on milite pour un passage de témoin à la jeune génération sur le plan politique ?
Ce débat n’est plus de mise pour moi, depuis le passage en force opéré pour obtenir le 3ème mandat qui est en cours. Je l’avais personnellement et publiquement dénoncé, quand le Conseil constitutionnel, en son temps, a exposé l’interprétation que nous savons tous. Pour le reste, il appartient au peuple ivoirien, libre et souverain, d’apprécier ou non de donner un quatrième mandat au régime actuel.
Pour le passage de témoin que vous évoquez, retenons que notre parti, le PDCI-RDA, se prépare activement à offrir une alternative au vaillant peuple de Côte d’Ivoire qui souffre à divers égards et qui est désireux de changements qualitatifs dans la gouvernance. C’est pourquoi la régularité de toutes les opérations électorales ainsi que la transparence du scrutin restent déterminantes, en 2025. Nous sommes donc tous invités à garantir ces conditions nécessaires à un processus apaisé et véritablement démocratique.
Permettez-moi de revenir sur 2025, année électorale qui se présentera avec d’énormes défis pour le PDCI-RDA et pour la Côte d’Ivoire tout entière. Quelles sont vos attentes pour les échéances à venir ?
La présidentielle de 2025 est un objectif que nous avons tous en vue. Les populations ivoiriennes espèrent le triomphe du PDCI-RDA. Nos militants et sympathisants attendent le retour de notre grand parti à la gestion des affaires nationales. Mais, il convient certainement pour ce faire, de réunir tous les moyens en termes d’unité en notre sein, de rassemblement dynamique et de mise en œuvre d’une stratégie audacieuse pour investir le pays réellement et présenter aux Ivoiriens et Ivoiriennes, une offre politique nouvelle à même d’apporter bien-être collectif et épanouissement individuel. Je reste donc convaincue que la victoire à cette échéance électorale historique est à notre portée si et seulement si notre famille politique se donne les moyens de se rassembler autour du meilleur profil et de garantir la contribution de tous ses militants.