Jacques Assahoré Konan (avant la 10e session extraordinaire de la CMAE): « Des défis socio-économiques peuvent être relevés en s’attaquant aux problèmes environnementaux… »
Lemandatexpress – La Côte d’Ivoire s’apprête à accueillir la 10e session extraordinaire de la Conférence Ministérielle Africaine sur l’Environnement (CMAE / AMCEN), au Sofitel Hôtel Ivoire d’Abidjan, du 30 août au 6 septembre 2024. Dans un contexte où la dégradation des terres, la désertification et les effets des changements climatiques menacent de plus en plus le continent, le ministre ivoirien de l’Environnement, du Développement durable et de la Transition écologique, M. Jacques Assahoré Konan, hôte de cet important sommet regroupant les Ministres de l’Environnement des 54 pays membres, présente dans cette interview, les grandes articulations et les enjeux de la conférence pour les pays membres de la CMAE.
Qu’est-ce que la Conférence Ministérielle Africaine sur l’Environnement (CMAE / AMCEN) ?
La Conférence Ministérielle Africaine sur l’Environnement (CMAE) représente une plateforme où les ministres africains de l’environnement, les institutions et les partenaires au développement partagent leurs expériences et élaborent les politiques visant à résoudre les problèmes environnementaux les plus urgents du continent africain. Créée en 1985, la CMAE tient ses sessions ordinaires une fois tous les deux ans et ses sessions extraordinaires entre les sessions ordinaires si nécessaire. C’est dans ce cadre que la Côte d’Ivoire est fière d’abriter, dans quelques jours (du 5 au 6 septembre 2024), la 10e session extraordinaire de cette organisation. Le Bureau Africain du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) assure le secrétariat de la Conférence.
Quels sont les principaux objectifs de cette 10e session extraordinaire de la CMAE ?
La 10e session extraordinaire vise principalement à permettre aux pays africains de discuter et d’affiner leurs positions avant la COP 16 sur la désertification qui aura lieu en fin d’année à Riyad en Arabie Saoudite. Ces objectifs incluent l’identification des priorités du continent, la formulation d’une position commune africaine, la définition des stratégies de négociation, et l’élection des représentants africains pour les différentes instances de la COP 16. En somme, cette session est une étape cruciale pour s’assurer que les préoccupations de l’Afrique sont bien prises en compte dans les négociations internationales sur l’environnement. Il s’agira également d’évaluer les recommandations de la COP 15 sur la désertification et la sécheresse, tenue comme vous le savez, du 9 au 20 mai 2022 ici à Abidjan, et dont notre pays assure la présidence jusqu’en décembre prochain.
« Rehausser nos ambitions en matière de lutte contre la dégradation des terres et la désertification »
Comment cette session prévoit-elle de renforcer l’engagement des États membres dans la lutte contre la sécheresse, la dégradation des terres, et la désertification en Afrique ?
La Plateforme Intergouvernementale sur la Biodiversité et les Services Ecosystémiques (IPBES) soutient qu’environ 65 % des terres en Afrique sont dégradées, affectant plus de 400 millions de personnes. Vous conviendrez avec moi qu’il est donc urgent de prendre des mesures concertées pour stopper et inverser cette tendance. C’est pourquoi, la session sera l’occasion pour nos pays de mettre l’accent sur le rehaussement de nos ambitions en matière de lutte contre la dégradation des terres et la désertification. Lors de la COP 15 dont nous parlions tantôt, les États s’étaient engagés à restaurer un milliard d’hectares de terres dégradées d’ici 2030. Il s’agit dans ce contexte, d’encourager les pays à intensifier leurs efforts pour renforcer la résilience face aux sécheresses, à améliorer les opportunités de restauration des écosystèmes, et à mobiliser davantage de ressources financières. Le but est de créer un cadre d’action concerté qui incite les États membres à prioriser ces enjeux environnementaux dans leurs politiques nationales et régionales.
Si la question de la neutralité en matière de dégradation des terres est importante, quels seraient les enjeux pour les pays africains de rehausser leurs ambitions dans ce cadre ?
La neutralité en matière de dégradation des terres propose de développer des solutions robustes, basées sur la capitalisation des acquis, pour lutter contre la dégradation des terres, préserver la biodiversité et lutter contre les changements climatiques. Elle préconise une gestion durable des terres et la restauration des terres dégradées. Atteindre cette neutralité est essentiel pour l’Afrique car nos pays pourront, non seulement protéger leurs ressources naturelles, mais aussi améliorer la sécurité alimentaire, réduire la pauvreté, et promouvoir un développement durable. Cela contribuera également à atténuer les impacts du changement climatique, qui exacerbe la désertification. Voici un résumé des enjeux qui en ressortent.
Quels seront les temps forts de la 10e session extraordinaire de la CMAE, et comment ces moments clés contribueront-ils à l’agenda environnemental de l’Afrique ?
Les moments clés de la session incluent la réunion préparatoire régionale de la Convention des Nations Unies sur la Lutte contre la Désertification (CNULCD/UNCCD), les consultations des groupes de la société civile, le segment des experts, et enfin le segment ministériel. Chaque segment joue un rôle crucial dans la mise en commun des idées, la formulation de stratégies, et la prise de décisions. Par exemple, le segment ministériel finalisera les positions communes africaines et renforcera les engagements des États membres, ce qui est vital pour influencer les négociations internationales lors de la COP 16 sur la désertification et la sécheresse.
« Les résultats de cette session seront directement utilisés pour préparer la COP 16 »
Monsieur le Ministre, avant de clore cet entretien, dîtes-nous à quoi serviront les résultats de la 10e session extraordinaire qui se tiendra à Abidjan ?
Les résultats de cette session seront directement utilisés pour préparer la COP 16, notamment en présentant de façon concertée, les préoccupations et priorités africaines dans les négociations globales. De plus, ces résultats seront intégrés dans les discussions au sein de l’Union Africaine, en particulier lors de la Session Ordinaire de l’Assemblée des Chefs d’État en 2025. Cela renforcera la position de l’Afrique dans les forums internationaux et assurera que ses besoins spécifiques en matière d’environnement sont pris en compte à l’échelle mondiale. Bon nombre des défis socio-économiques de l’Afrique peuvent être relevés en s’attaquant aux problèmes environnementaux locaux. C’est pourquoi, je salue la capacité de la Conférence à renforcer la coopération régionale et à élaborer des politiques environnementales communes pour stimuler la prospérité et améliorer le bien-être de nos populations.
SOURCE : DIRCOM MINEDDTE
NB: Les titres et les exergues sont de la rédaction