Investiture annoncée de Gbagbo : Coup de pression stratégique ou prémices d’une guerre ouverte?(décryptage)
Lemandatexpress – Le 10 mai prochain, le PPA-CI va franchir un pas dans son combat visant à faire réinscrire le président Laurent Gbagbo sur la liste électorale.
Ils ne l’ont jamais dissimulé. Pour les militants du PPA-CI, la seule et unique candidature qui vaille en leur sein, dans le cadre de la présidentielle 2025, est celle de Laurent Gbagbo. Il est le plan A, B, C voire Z, disent-ils.
L’irréversibilité de cette conviction se confirme au fil des semaines. Ce samedi 13 avril, au terme d’une session extraordinaire du Comité central, le PPA-CI a annoncé l’investititure de son champion, le 10 mai prochain, au Sofitel Hôtel Ivoire. Une semaine plus tôt, à Agboville, à la fête de la Renaissance, l’intéressé lui-même réaffirmait ouvertement son adhésion à la volonté de ses partisans. “Les militants du PPA-CI ont présenté ma candidature depuis que je suis revenu (de la Haye). Ils me tarabustent pour que je sois candidat. J’ai fini par dire oui et je dis oui”, avait lancé le Woody de Mama.
À cette occasion, Gbagbo avait remis sur le tapis la question de son éligibilité en livrant avec force détail sa version des faits sur l’affaire dite du braquage de la BCEAO, qui lui vaut la déchéance de ses droits civiques donc la perte de sa qualité d’électeur. Depuis, un document exclusif qui le disculperait, selon lui, a été publié par voie de presse.
Bien avant, le gouvernement avait été saisi à l’effet d’ouvrir des discussions avec le PPA-CI pour la réinsertion de l’ancien chef de l’État sur la liste électorale. Sur ces entrefaits, l’on aurait pu subbodorer que le parti attendrait la suite de cette double démarche pour aviser. Que non! Les socialistes sont résolument engagés sur la voie de la présidentielle, avec Gbagbo. D’où l’investititure annoncée de ce dernier, dans un mois, alors qu’il est, jusqu’ici, frappé de forclusion pour cette échéance.
Deux analyses se dégagent
Dans cette configuration, deux analyses se dégagent. Primo, il s’agirait pour le PPA-CI d’exercer stratégiquement une vive pression sur l’exécutif pour obtenir gain de cause. En investissant son candidat à plus d’un an de la présidentielle, le parti des peuples africains envoie, en effet, un message à l’opinion, à savoir qu’il rentre, dès le 10 mai, en campagne pour 2025. Toute chose qui aurait pour conséquence de contraindre le pouvoir Ouattara à restaurer les droits civiques de l’ancien détenu de Scheveningen (à la Haye).
Dans un passé récent, pour la présidentielle 2010, Laurent Gbagbo, alors à la tête de l’exécutif ivoirien, avait en vertu de l’article 48 de la Constitution, décrété la candidature du président Alassane Ouattara, porte-étendard du RDR, dont la nationalité était sujette à caution.
Selon l’article 48, “Lorsque les Institutions de la République,l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou
l’exécution de ses engagements internationaux sont menacées d’une manière grave et immédiate, et que le
fonctionnement régulier des pouvoirs
publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exceptionnelles exigées par ces circonstances après consultation obligatoire du Président de l’Assemblée Nationale et de celui du Conseil
Constitutionnel”.
Le PPA-CI attendrait-il un retour de l’ascenseur de la part du chef de l’État ivoirien? C’est une option à prendre en considération.
Dans un second temps, l’analyse qui se dégage de cet enchaînement effréné des événements au PPA-CI, c’est l’éventualité d’un basculement dans la violence en cas de l’echec de toutes les voies de recours. Des partisans de Laurent Gbagbo, rencontrés à Agboville, ont été clairs. Pour eux, il faut éviter de plonger le pays dans le chaos en rejetant la candidature de l’ancien chef de l’État. Autrement dit, à terme, la forclusion confirmée du Woody serait potentiellement conflictogène.
En tout état de cause, les socialistes semblent sur le pied de guerre, au propre comme au figuré. Il faut espérer tout simplement que cette crise sur l’éligibilité de leur mentor connaisse un dénouement sans accrocs. Car, après l’épisode sanglant de 2010-2011, la Côte d’Ivoire n’a plus intérêt à retomber dans une crise sociopolitique dont les conséquences seraient dommageables.
MKG