Côte d’Ivoire: Débat autour de la CEI, quand Gbagbo soutient une chose et son contraire…
Lemandatexpress – Partie prenante de la création de la CEI, Laurent Gbagbo en est, aujourd’hui, l’un des plus grands pourfendeurs. Et pourtant.
Tant que ça lui profite en le désignant vainqueur comme en 2000, la CEI (CNE, à l’epoque) est parfaite. Mais quand les résultats proclamés ne sont pas en sa faveur, il la voue aux gémonies. C’est ce qui ressort clairement des propos tenus par Laurent Gbagbo, samedi dernier, sur l’institution électorale de la République de Côte d’Ivoire.
Du haut de la tribune de la fête de la Renaissance, le leader du PPA-CI disait ceci : “On a créé la CEI, Honoré Guié qui est le président de la première CEI (la CNE, pour être pour plus précis), c’était bon. Guéi (Robert Cuéi) l’a d’ailleurs arrêté. Pendant qu’il proclamait les résultats, on l’a fait arrêter. Parce que les résultats qu’il proclamait ne lui plaisaient pas. Finalement quand on l’a libéré, il m’ a proclamé élu”.
Mais l’on a aussi en mémoire la scène ubuesque de 2010 quand Damana Pickass, membre de la majorité présidentielle d’alors, froissait et dechirait les fiches de procès verbaux en pleine proclamation des résultats du second tour de la présidentielle. À l’époque, comme Guéi, il aurait souhaité que les résultats profitent au FPI et ses alliés. C’est ce qui avait, d’ailleurs, valu au président Beugré Mambé son degommage (en janvier 2010) pour fraude supposée sur la constitution de la liste électorale.
De fait, pour Laurent Gbagbo, la CEI (ou CNE) qui était bonne en 2000 est “maintenant pire que le ministère de l’Intérieur” (dixit)
C’est le serpent qui mort sa queue. Après avoir longtemps incriminé l’organisation des élections par le ministère de l’Intérieur, parce que soupçonnant les ministres de parti pris, Laurent Gbagbo avait milité pour un organe de rechange. Ainsi, par ordonnance, Robert Guéi, le président de la junte au pouvoir (1999-2000) nommait Honoré Guié à la tête de la Commission nationale électorale.
Porté à la tête de la Côte d’Ivoire, le président Gbagbo, en application des dispositions de la Constitution ivoirienne faisait créer, le 9 octobre 2001, une nouvelle institution, la Commission électorale indépendante (CEI), chargée de l’organisation et la supervision du référendum, ainsi que des élections.
Mais, comme par hasard, le Woody de Mama n’a de cesse de vilipender la CEI. Le chef de file du PPA-CI a même soutenu, samedi dernier, que “sur la CEI, il y une grande erreur de tous les militants de gauche africaine”. L’opposition ivoirienne appréciera.
En réalité, pour masqer leur incapacité à battre le candidat du pouvoir, ils s’étaient réfugiés derrière le prétexte de l’impartialité du ministère de l’Intérieur. Car il suffit de regarder au Sénégal avec les élections de Wade, Sall et Faye pour dire que l’organe chargé des élections n’est pas le problème en soi. Plutôt la capacité ou non des partis de l’opposition à proposer un programme de société clair, lisible à même d’accrocher l’électorat. Autrement, ils seront toujours prêts à se victimiser.
En France, les élections sont organisées par le ministère de l’Intérieur et le ciel n’est jamais tombé sur la tête des Français. La gauche africaine a souhaité une Commission nationale pour les élections. Mais elle a toujours à redire sur cet organe.
En somme, comme dirait l’autre, à un moment donné, il faut faire confiance aux institutions de la République. Parce que Laurent Gbagbo lui-même, sur la question de l’indépendance de la CEI, n’a visiblement pas mieux à proposer que ce qui se fait actuellement. Du moins si l’on en croit sa réflexion de samedi dernier, à Agboville. “Peut-être qu’on va mettre des gendarmes, des policiers ou des militaires. Mais il faut qu’on trouve quelque chose (…)Il faut réfléchir à nouveau et faire en sorte que la CEI soit vraiment indépendante du pouvoir et de tous partis politiques”, a-t-il suggéré. Comprendra qui voudra.
MKG
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