Omar Alieu Touray (CEDEAO) :« Malgré les malentendus, nos portes resteront toujours ouvertes aux Etats de l’AES »
A un tournant décisif de son histoire, la Communauté économique des Etats de l’Ouest (CEDEAO) fait face, depuis peu, au départ annoncé de trois de ses membres fondateurs : le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Dans un entretien accordé à Jeune Afrique, le président de la commission de l’organisation sous régionale, Omar Alieu Touray s’est prononcé sur la question avec un soupçon d’optimisme.
Alors que les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES) – le Mali, le Burkina Faso et le Niger –, semblent déterminés à aller au bout de leur logique de retrait de la CEDEAO, le Gambien Oumar Alieu Touray, président de la Commission de l’institution sous-régionale, veut croire à une sortie de crise. En marge du 37e sommet de l’Union africaine, auquel il participait le week-end dernier, à Addis-Abeba, il est revenu sur les soubresauts qui agitent l’espace communautaire ouest-africain, dans les colonnes de Jeune Afrique.
En plus des négociations avec les juntes sahéliennes, le Gambien a évoqué la crise politique au Sénégal. A la question de savoir si toutes les médiations en cours, pour la levée des sanctions, l’établissement d’un chronogramme électoral, ou la libération de Mohamed Bazoum sont abandonnées, étant donné les pays que les pays de l’AES persistent dans leur voie., Oumar Alieu Touray se la joue optimiste. « Le 8 février, les missions de médiation et le Conseil de sécurité de la CEDEAO se sont réunis au niveau ministériel. La CEDEAO a décidé, à cette occasion, de garder sa porte ouverte à ces trois pays. La CEDEAO est une organisation qui va au-delà des gouvernements. C’est une communauté de citoyens, une communauté de personnes. C’est pourquoi, malgré les malentendus, nos portes resteront ouvertes et nous continuerons ce que nous avons commencé », a-t-il assuré.
En effet, quelle que soit la position de ces pays, la CEDEAO, à l’en croire, privilégie la voie diplomatique. « Nous poursuivrons le dialogue et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas discuter. Rien n’indique que nos frères du Mali, du Burkina Faso et du Niger ne sont pas sensibles à nos mains tendues. Nous sommes donc très optimistes ». Il apparaît clairement que le président de la Commission n’envisage pas l’avenir de la CEDEAO dans la division.
Toute chose qui aurait des répercussions économiques considérables. Pour lui, tous les pays, appartiennent « toujours à une seule communauté et nous sommes conscients du fait que les peuples ouest-africains veulent l’unité. Nous voulons tout faire pour ne pas séparer ces peuples, nos peuples, qui jouissent de la libre circulation, qui bénéficient d’un certain nombre de réalisations, comme le commerce intercommunautaire au sein du marché commun. Ce sont là des acquis dont tous les citoyens de la CEDEAO doivent pouvoir continuer à bénéficier ».
Autrement dit, la CEDEAO, selon lui, reste une et indivisible. Et qu’il n’y a pas de raison de craindre une quelconque bipolarisation. « Je ne vois pas d’antagonisme ici. Mon avis est que la division, en toute circonstance, nous rend plus faible. Aucun d’entre nous, ni les trois pays [de l’AES] ni les autres États membres de la CEDEAO, ne sortiraient gagnants d’une telle séparation. Notre communauté a tout à gagner à rester unie et nous comptons travailler en ce sens », a-t-il plaidé avant de se prononcer sur la crise sénégalaise.
Notamment la tenue des élections qui a donné lieu à un tango institutionnel entre le parlement et le Conseil constitutionnel, mettant à mal la stabilité politique du pays et pourrait avoir des conséquences dans toute la région. « Le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la question. Il ne s’agit donc pas de dire si c’est une erreur ou non. Le Conseil constitutionnel a décidé que ce qui était proposé n’était pas conforme à la Constitution et la présidence sénégalaise a publié une déclaration affirmant qu’elle prenait note de la décision du Conseil et qu’elle s’y conformerait. C’est ce qui importe désormais », a commenté Omar Alieu Touray.
Martial Galé