Affaire ‘’8 millions d’inscrits sur la liste électorale, une anomalie’’ : Tidjane Thiam tacle inutilement la CEI
Le président du PDCI-RDA est déjà à l’offensive, à un peu plus d’un an de la présidentielle 2025. Lors d’une rencontre, mercredi, avec la Zone Ouest Zadi, Tidjane Thiam, revisitant ses ambitions pour la République, a soulevé la question de la liste électorale. Une sortie controversée.
Brillamment élu à la tête du PDCI-RDA, lors du 8e congrès extraordinaire (22 décembre 2023), Thiam Tidjane est décidé à prendre son bâton de pèlerin pour ramener le parti septuagénaire au sommet de l’Etat. Dans cette optique, le polytechnicien s’est rendu dans la zone Ouest Zadi, mercredi, en ouverture de ses tournées aux quatre coins du pays. Relevant la symbolique de ce choix de départ, le successeur du sphinx de Daoukro n’a pas manqué de faire irruption sur le terrain de la Commission électorale indépendante. Tidjane Thiam s’est adonné, en effet, à un jeu de statistiques.
Pour l’ancien ministre du Plan, qui veut faire de la population de l’ouest un facteur déterminant dans sa quête du pouvoir d’Etat, le corps électoral des dernières consultations est une anomalie. « Nous sommes à peu près 30 millions d’habitants en Côte d’Ivoire. 8 millions, ça fait à peu près 28 voire 29%. Le Ghana voisin a 32 millions d’habitants et 17 millions sur sa liste électorale soit 53%. J’ai regardé le Sénégal qui est dans l’actualité actuellement, c’est 7 millions d’inscrits pour 17 millions d’habitants. C’est une anomalie. Une vraie anomalie qui a beaucoup de problèmes pour notre démocratie. Tant que ce problème n’aura pas été surmonté, les résultats des élections auront un problème de crédibilité », a-t-il supposé. Dans son développement, l’ancien patron du Crédit Suisse dit avoir ‘‘demandé à des experts internationaux pour savoir la norme’’.
On me dit qu’un pays doit avoir au moins 40%. 40% pour qu’une élection soit vraiment représentative de l’en- semble de la population, ce qui fait 12 millions. Donc, on est très loin de ce chiffre-là aujourd’hui. J’accepte les messages sur la CEI, sur le découpage électoral, sur l’audit de la liste électorale, mais on travaille sur une partie du problème. Le vrai fond du problème, c’est qu’on est à 8 millions, alors qu’on devrait avoir au moins 12 millions. Si on pouvait faire passer ce chiffre-là au niveau où il devrait être, je vous assure que la dynamique électorale serait très différente », a-t-il ajouté, comme pour mettre à caution le travail de la commission et les résultats des récentes élections. Cette affirmation de Tidjane Thiam est d’autant plus surprenante qu’elle ne tient pas compte de tous les contours en matière de démographie. C’est ce que relève d’ailleurs Yacouba Doumbia, dans une analyse à chaud. « Thiam semble avoir omis un détail crucial : sur les 29 millions d’habitants du pays, 22% sont des étrangers, soit 6.380.000 personnes. En retirant ce nombre du total, il reste 22.620.000 citoyens Ivoiriens. En appliquant le critère des 40% à ce nombre, il en résulte un besoin de 9.048.000 électeurs pour une représentation démocratique adéquate, et non pas des 12 millions qu’il prétend. Avec déjà 8.016.796 d’électeurs inscrits, il ne manque donc que près d’un million d’électeurs à mobiliser, un objectif bien plus réalisable. Les 8 millions d’électeurs déjà mobilisés ne sont pas une anomalie. C’est lui qui s’est plutôt planté », pointe le journaliste.
De fait, comparaison n’est pas raison. La Côte d’Ivoire étant une terre d’accueil, son corps électoral n’est pas forcément conforme à celle des pays cités par Tidjane Thiam, sur la base de sa population globale. Dans une autre mesure, comme l’a souligné Yacouba Doumbia, il appartient aussi à toutes les formations politiques de mobiliser leurs militants pour se faire enrôler sur la liste. Rien ne sert de toujours accabler la CEI quand on a longtemps pratiqué la politique de l’autruche.
Martial Galé