Mode : Le style japonais Issey Miyake, est décédé à 84 ans
Le créateur de mode Issey Miyake est mort à l’âge de 84 ans. Riche d’une carrière de plus de 50 ans marquée par la recherche de nouveaux matériaux, la quête de la diversité sur les podiums et surtout le dialogue avec l’Occident, il était l’un des noms les plus importants de la mode japonaise dans le monde.
Né le 22 avril 1938 à Hiroshima (ouest du Japon), Miyake a 7 ans le 6 août 1945 quand les États-Unis larguent la première bombe atomique de l’Histoire sur sa ville natale, faisant 140 000 morts – dont sa mère, décédée trois ans plus tard victime des radiations. Pendant longtemps, le créateur évite le sujet, même s’il garde lui-même des séquelles physiques et surtout des souvenirs de l’attaque.
« Quand je ferme les yeux, je vois encore des choses que personne ne devrait jamais vivre : une lumière rouge aveuglante, le nuage noir peu après, des gens qui courent dans toutes les directions en tentant désespérément de s’échapper – je me souviens de tout ça », témoigne-t-il en 2009 pour plaider en faveur du désarmement nucléaire.
De ce traumatisme, le jeune Miyake préfère garder l’envie de construire, et se concentre sur « les choses qui peuvent être créées et non détruites, et qui apportent de la beauté et de la joie », comme il le disait.
Arrivé à Paris en 1964 après avoir étudié le graphisme au Japon, il fait ses armes chez Guy Laroche et Givenchy, avant de travailler deux ans chez Geoffrey Beene, à New York. En 1970, il lance sa propre marque, qui rencontre rapidement le succès.
Contemporain de Kenzo, il a été l’un des premiers créateurs japonais à présenter ses collections à Paris. Dès ses débuts, mélangeant le style japonais à celui de l’Occident comme personne, Miyake s’inspire des traditions de son pays pour créer une mode qui s’adapte à tous les goûts et à toutes les morphologies, partout. Comme quand il développe des vêtements en taille universelle. Ou quand il revisite à sa façon le traditionnel origami, les pliages japonais, pour créer Pleats Please, une ligne de vêtements entièrement plissés qui s’adaptent aux corps. Il innove aussi beaucoup, puisqu’il utilise des coupes au laser encore méconnues dans les ateliers de couture à l’époque.
Collection de prêt-à-porter printemps-été 2013 d’Issey Miyake, présentée à Paris.
Le créateur contribue à la lutte pour la diversité sur les podiums. Il fait défiler des jeunes filles noires en 1976 sans discours ou prise de position affichée. Il invite également des modèles octogénaires à défiler bien avant les débats sur l’âgisme.
Miyake aime les matières, l’expérimentation, mais surtout le rapport du vêtement au corps. Toujours attiré par les gens de la rue, il passe son temps à essayer de comprendre comment ils vivent et s’habillent. Des vêtements qui doivent être « vus de l’extérieur et vécus de l’intérieur », comme il les décrit.
« Les gens achètent les vêtements, qui deviennent des outils de créativité pour ceux qui les portent », défendait le designer. Au point de ne pas reconnaître ses créations quand il les croisait dans la rue. « J’adore voir les gens s’approprier ce qu’ils portent, j’aime que cela ne soit plus du tout à moi, mais tout à eux. Quand je vois les vêtements sur le dos du porteur, notre communication se complète ».
Rfi