Interview- Vision 2030, PND 2021-2025 et PsGouv 2 : Achi explique la « Côte d’Ivoire solidaire » de Ouattara
Porté à la tête du Gouvernement ivoirien par le Président de la République Alassane Ouattara, le 26 mars 2021, Patrick Achi a officiellement pris fonction le 30 mars. Avec pour ambition affichée de repositionner le secteur privé comme le moteur de la croissance économique par des investissements massifs dans les secteurs stratégiques du développement socioéconomique de la Côte d’Ivoire. Et ce, sur la base de « la vision 2030 » du chef de l’Etat, du « PND 201-2025 » dont le montant est estimé à 59 000 milliards FCFA, auxquels s’ajoute le PsGouv 2. Dans une interview accordée au magasine ‘‘Twins’’, le Premier ministre Patrick Achi, président du Conseil de Concertation explique les grands défis économiques et sociaux du Gouvernement, ainsi que les enjeux du Dialogue Public-Privé, contenus dans le projet de la « Côte d’Ivoire solidaire ».
Pour ce nouveau quinquennat, un troisième PND qui s’étend sur la période 2021-2025 a été élaboré. A combien se chiffret-il et quel sera son mode de financement ? Quelles en sont les grandes articulations et quelle est la vision du nouveau PND ?
Pour donner une nouvelle impulsion à son élan de développement, le Gouvernement a décidé, dès 2011, de renouer avec la tradition de planification de notre pays en la mettant au cœur de l’action publique. Ainsi, après la mise en œuvre des PND 2012-2015 et 2016-2020, nous venons d’adopter un nouveau PND sur la période 2021-2025 pour mieux répondre aux nouveaux défis et consolider les acquis. Le niveau d’investissement global prévu au titre du PND 2021-2025 est de 59 000 milliards de FCFA dont 43 646,7 milliards pour le secteur privé (soit 74%) et 15 353,3 milliards pour le secteur public (soit 26%). Le PND 2021-2025 est articulé autour de six (06) piliers. Il s’agit de parvenir à la transformation structurelle de l’économie à travers un secteur privé dynamique et créateur d’emplois et une transformation des matières premières grâce au développement de zones industrielles et une stratégie d’intégration dans les chaines de valeurs internationales. Le PND consacre également la notion de solidarité à travers le développement du capital humain, la création d’emplois notamment pour les femmes et les jeunes et l’inclusion sociale. Grâce au PND, le Gouvernement va apporter le soutien de l’État à ceux d’entre nous qui ont besoin de l’expression de la solidarité nationale. Enfin, le Président de la République a voulu que le renforcement de la gouvernance, la modernisation de l’État et la transformation culturelle des populations constituent des axes prioritaires du PND. Pour parvenir aux objectifs qui sont fixés, le Gouvernement travaillera sur des sujets transversaux comme l’identification des populations avec l’instauration d’un numéro unique par personne, le développement du numérique, l’amélioration des conditions de financement de l’économie, etc. Faut-il le rappeler, ce PND constitue le premier instrument qui contribuera à permettre au Gouvernement d’atteindre les objectifs de 2030 notamment la réduction de moitié de la pauvreté, le doublement du revenu par tête et l’augmentation significative du taux de transformation des matières premières. Déjà en 2025, le Gouvernement entend garantir l’accès universel à l’électricité et à l’eau et permettre aux populations d’accéder à des soins de santé de qualité.
Dans une logique de continuité de l’action gouvernementale, serait-il possible d’avoir un bilan succinct des deux précédents PND (2012-2015 et 2016-2020) ?
Les deux précédents PND ont permis à la Côte d’Ivoire de se mettre à niveau dans bien de domaines après les conséquences de la grave crise de 2011. Les réformes ont permis une dynamique économique forte de 2012 à 2019 avec une croissance de 8% en moyenne par an. Le Gouvernement a fait passer le taux d’électrification de 33% à 80% entre 2011 et 2020. Il a construit plus de 623 Etablissements Sanitaires de Premier Contact, des Hôpitaux Généraux, un Centre Hospitalier Universitaire (CHU), des Centres Hospitaliers Régionaux (CHR) pour améliorer l’accès à la santé. Il a rendu opérationnel l’accès à la Couverture Maladie Universelle (CMU) pour intégrer les plus faibles. Le nombre de localités ayant accès à l’eau potable est passé de 885 en 2011 à 1185 en 2020 ; des zones industrielles ont été créées, de nouvelles universités ont été construites et l’image de marque de la Côte d’Ivoire a été totalement transformée pour en faire un pays phare en matière d’attractivité économique, un partenaire qui compte dans la sphère diplomatique mondiale et l’Ivoirien a regagné sa place dans le concert des nations. En un mot, les deux premiers PND ont été ceux de la restauration des grands fondements du développement social économique et culturel et de l’image de marque de notre pays.
Dans la mise en œuvre du projet de société « Côte d’Ivoire Solidaire » du Président de la République, qu’est-ce qui sera fait pour l’amélioration des conditions de vie des populations ?
Le projet « Côte d’Ivoire solidaire » va permettre de consolider les acquis économiques des années antérieures. Le Président de la République veut transformer sur place nos productions afin de créer de la valeur ajoutée et générer des emplois. Il veut que les conditions d’études de nos enfants s’améliorent davantage avec la création de nouvelles universités et des efforts de renforcement de l’enseignement professionnel et technique. Le Président de la République entend renforcer la compétitivité économique grâce aux grands projets d’infrastructures. De façon simple, le Programme « Côte d’Ivoire Solidaire » va permettre de donner de l’emploi aux jeunes, de rendre les femmes plus autonomes, de redonner au secteur privé la primeur en termes de politiques et la priorité en termes d’actions afin de l’aider à grossir et à augmenter les revenus fiscaux de l’État . En 2025, le taux de couverture de l’électricité serait de 100%, la Côte d’Ivoire sera ainsi le premier pays en Afrique subsaharienne à atteindre la couverture universelle. Il en sera de même pour l’eau potable. Nous allons développer la construction des habitats à loyer modéré comme c’était le cas par le passé dans notre pays avec des options de locations et de location-vente. Nous allons renforcer la couverture maladie universelle pour intégrer près de huit (8) millions de personnes et continuer l’extension des projets de filets sociaux afin d’aider les populations les plus exposées. Nous allons construire de nouvelles zones industrielles, développer le port sec de Ferkessedougou tout en poursuivant de grands projets structurants qui vont changer définitivement notre pays.
Vous avez présenté le programme stratégique « vision 2030 ». Quels sont, de façon spécifique, les objectifs qui sous-tendent cette vision et quels en sont les résultats attendus ?
Au cours du Séminaire gouvernemental tenu du 21 au 23 avril 2021 auquel le secteur privé a été associé, j’ai effectivement présenté le programme stratégique « Vision 2030 » au secteur privé à l’effet de son appropriation pour le développement de notre pays sur les dix (10) prochaines années. L’objectif de cette vision est de faire en sorte qu’à l’horizon 2030, l’économie ivoirienne soit industrialisée, que le peuple ivoirien soit majoritairement affranchi de la pauvreté et de la vulnérabilité, et qu’il ait accès à une qualité de vie moyenne. De façon spécifique, il s’agira d’ici 2030 de doubler le revenu par tête, réduire le taux de pauvreté à moins de 20%, doubler la population en emplois, porter le taux d’investissement global à 40%, rehausser l’espérance de vie de 10 ans en passant de 57 à 67 ans et de relever le niveau de l’éducation en portant le taux net de scolarisation au primaire à 100% et celui du secondaire à 80%, tout en améliorant substantiellement les performances et les compétences des apprenants.
Au cours du récent séminaire gouvernemental, il a été question de l’élaboration du Plan d’Actions Prioritaires sur la période 2021-2023, avec un focus sur l’année 2021. Quelles ont donc été les actions prioritaires pour l’année 2021 ? Et quel est le programme du Gouvernement qui sera déroulé jusqu’en 2023 ?
Du 21 au 23 avril 2021, j’ai organisé et conduit sous la Haute Présidence de SEM Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, un séminaire gouvernemental qui a vu la participation historique du secteur Privé durant toute la journée du vendredi 23 avril 2021. Le séminaire a permis d’élaborer le programme du Gouvernement pour l’année 2021 qui a été adopté en Conseil des Ministres le 26 mai 2021. Ce programme s’appuie principalement sur les projets et investissements prévus au budget 2021 des Ministères techniques et Structures rattachées et sur les réformes à mettre en œuvre. D’un coût global de 2 698 milliards de francs CFA, réparti en 2 543 milliards de francs CFA pour les Projets et 155 milliards de francs CFA pour les réformes, le Programme du Gouvernement au titre de l’année 2021 comprend 393 projets d’investissements et 151 réformes à entreprendre. Ce programme apporte des réponses aux principales problématiques de développement de notre pays, notamment la sécurité, les défis liés à la crise sanitaire, l’insertion professionnelle des jeunes et des femmes, les ordres d’enseignement, le développement du secteur privé et la transformation des matières premières. Nous avons aussi débattu des questions de gouvernance et de lutte contre la corruption qui va se poursuivre. Pour ce qui est du programme du Gouvernement jusqu’en 2023, il résulte du PND 2021-2025 dont les piliers sont alignés sur ceux de la « vision 2030 ». Il s’agit simplement de la déclinaison annuelle des grands objectifs à moyen terme qui va permettre d’avoir une approche programmatique glissante et cohérente avec le plan quinquennal.
Monsieur le Premier Ministre, lors des débats en marge du séminaire gouvernemental, il a été question des goulots d’étranglement qui affectent notre potentiel de croissance. Quels sont-ils ? Et sur quels leviers faut-il agir pour les lever ?
Effectivement à l’occasion du séminaire gouvernemental, les membres du Gouvernement ont échangé avec le secteur privé sur plusieurs sujets de l’action gouvernementale et ont relevé certaines difficultés pouvant affecter leurs activités et donc le potentiel de croissance de notre pays. Au terme de ces échanges, j’ai décidé de mettre en place des groupes de travail sectoriels pour traiter des problématiques telles que la réduction des délais de remboursement de la dette fournisseur et la mise en place d’un système intégré de traçabilité ; l’amélioration de l’appareil judiciaire ; la lutte contre la corruption en général et le renforcement de la bonne Gouvernance ; le renforcement de la lutte contre la fraude et la contrefaçon et l’amélioration de la compétitivité du système fiscal et douanier. Sur ces points, nous avons fait des progrès importants et le Gouvernement suit aujourd’hui le taux d’engagements et le taux de décaissements des projets par Ministère. Nous avons discuté avec le secteur privé des principales préoccupations sectorielles et un ensemble de solutions a été arrêté. Elles seront connues d’ici peu au terme des échanges que nous poursuivons.
Quelles sont les grandes lignes de la relance économique après la pandémie de la COVID- 19 ?
Face à l’ampleur de la crise, le Gouvernement a promptement apporté une réponse en mettant en place le Plan de Soutien Economique Social et Humanitaire (PSESH) d’un montant de 1 796,78 milliards de FCFA (soit plus de 5% du PIB) dont 95,88 milliards de FCFA pour financer la riposte sanitaire et 1 700,9 milliards de FCFA pour le plan de soutien économique, social et humanitaire. La mise en œuvre effective de ces plans s’est traduite par des mesures de soutien aux entreprises, d’appui à l’économie ainsi que des mesures sociales en faveur des populations. Ainsi, malgré la pandémie, la croissance est ressortie positive à 2% en 2020, l’une des meilleures performances dans un contexte de récession mondiale. Le déficit budgétaire s’est établi à 5,6% du PIB à fin 2020. Je déplore chaque décès dans notre pays, car ce sont des familles qui sont affectées. Nous devons poursuivre les efforts pour les éviter et à tout le moins pour les réduire au maximum. Cependant en regardant ailleurs dans d’autres pays aussi bien dans la sous-région que sur d’autres continents, nous pouvons noter que le Gouvernement a su répondre à la hauteur des défis que la COVID imposait à notre pays. Les instruments d’atténuation des impacts de la crise ont permis d’éviter une récession et les efforts se poursuivent afin de reprendre la dynamique économique d’antan le plus tôt possible. L’éducation, l’accès à la santé pour tous, la formation, l’emploi, l’électrification ainsi que l’adduction en eau potable figurent au nombre de vos priorités.
Quel est l’état actuel des réalisations dans ces secteurs et qu’est-ce qui va être amélioré pour les prochaines années ?
Depuis 2011, d’importants investissements et des réformes d’envergure ont été mis en œuvre pour l’amélioration en qualité comme en quantité de l’offre dans les secteurs sociaux, notamment l’éducation/formation, la santé, l’emploi des jeunes, l’électrification, l’accès à l’eau potable, les routes, etc. Ces investissements ont contribué au triplement des dépenses pro-pauvres, ce qui a permis d’améliorer considérablement la qualité et la disponibilité des services sociaux sur toute l’étendue du territoire national. En 2019, dans sa volonté d’œuvrer continuellement à l’amélioration du bienêtre des populations, le Président de la République a instruit le Gouvernement sur la mise en place du Programme Social du Gouvernement (PSGouv), un programme axé sur le social et qui a enregistré des résultats concrets. Au niveau de l’éducation/formation, les chiffres sur les résultats concrets enregistrés sont significatifs. Pour ce qui est de la santé, le CHU d’Angré est fonctionnel, le CHR de Gagnoa est fonctionnel et nous venons de construire le CHR d’Aboisso et les travaux du CHU d’Abobo vont démarrer avant fin décembre. Je ne vous apprends rien en indiquant que l’université de Man est fonctionnelle avec 6 autres universités et que celle de San Pedro va accueillir ses premiers étudiants dans un mois. Notez aussi que l’université de Bondoukou est en cours de construction et qu’une autre sera construite à Odienné. Nous avons également plusieurs acquis en matière de routes, d’électrification, d’eau potable et j’en passe. Le PSGouv est devenu un label pour les Ivoiriens. C’est le programme qui apporte des solutions concrètes aux préoccupations des populations et à ce titre, le Gouvernement va définir un nouveau PSGouv pour la période 2022-2024 afin de renforcer les acquis dans tous les domaines sociaux. L’assainissement du cadre de vie des Ivoiriens n’est plus un vain mot. Le gouvernement a déjà entrepris plusieurs actions d’envergure.
A quoi doivent s’attendre les populations pour les prochaines années ?
Conformément à la vision de Son Excellence Monsieur le Président de la République dans son programme « Côte d’Ivoire Solidaire » qui met l’Ivoirien au cœur du développement, celui-ci doit s’attendre à la poursuite de la dynamique entamée. Le programme « Côte d’Ivoire Solidaire » veut faire de l’Ivoirien un acteur de cette dynamique. Il n’y a pas d’un côté le Gouvernement et de l’autre la population ; il y a un ensemble unique composé du peuple ivoirien engagé chaque jour dans les efforts pour améliorer par apport individuel et collectif de nouvelles pierres à l’édification d’une société plus prospère où il fait bon vivre et où on vit mieux. La « Côte d’Ivoire Solidaire » c’est cela ! Chacun doit sentir chaque jour, un plus par rapport à une situation antérieure donnée. Nous devons y croire et nous devons y travailler ensemble.
Lors du séminaire gouvernemental, l’on a assisté à une innovation majeure, une session dédiée au secteur privé. Selon votre vision stratégique, comment comptez-vous impliquer le secteur privé dans l’élaboration et la mise en œuvre des différentes réformes du Gouvernement ?
Avant tout propos, une clarification s’impose. Je voudrais préciser ici que la Vision stratégique Côte d’Ivoire 2030 est bel et bien celle du Président de la République, S.E.M Alassane Ouattara. Il a bien voulu charger le Gouvernement de mettre en œuvre les grandes orientations stratégiques découlant de cette vision à travers notamment le Plan National de Développement (PND) 2021- 2025 pour une Côte d’Ivoire plus solidaire. Je voudrais par ailleurs préciser que l’État ivoirien a pour habitude d’échanger avec le secteur privé avant la prise de toute réforme qui pourrait impacter l’environnement des affaires. Ceci dit, ce qui change, dans le cadre de la Vision 2030, c’est l’intensité et l’étroitesse de cette collaboration. Aujourd’hui, l’État compte retrouver son rôle de propulseur du secteur privé et de chef d’orchestre des investissements dans les secteurs stratégiques. A cette fin, nous prévoyons de soutenir activement le développement d’un tissu de PME nationales qui deviendront progressivement des champions nationaux, capables d’aller conquérir des marchés dans la sous-région et à l’international. Cette approche plus proactive de l’État dans le développement du secteur privé passe nécessairement par une transformation culturelle de l’administration. C’est le signal fort que nous avons voulu donner, en organisant pour la première fois dans la pratique administrative de notre pays, une session dédiée au secteur privé lors du séminaire gouvernemental d’avril dernier.
Pour revenir à votre question, cette session a été le point de départ de l’institution d’un dialogue et d’une concertation au haut niveau entre le Gouvernement et le secteur privé en tant que partenaires pour l’élaboration et la mise en œuvre des différentes réformes prévues jusqu’en 2030 en vue de la transformation structurelle de la Côte d’Ivoire. Depuis la fin de ce séminaire gouvernemental, nous avons lancé, conformément à ce que nous avions annoncé, une série de consultations avec le secteur privé, appelées « labs » en vue de déterminer de manière consensuelle, les réformes et les actions à mettre en œuvre pour donner un réel coup d’accélérateur à ce secteur hautement stratégique pour notre pays. Des groupes de travail sectoriels État/Secteur privé ont été mis en place et sont actuellement à l’œuvre dans ce but. Les réformes nécessaires identifiées à l’issue de ces travaux seront mises en œuvre avec, et j’insiste sur ce point, les acteurs des filières économiques concernés. C’est le sens des déjeuners de travail que nous avons eus avec tous les acteurs de la chaîne des industries culturelles et créatives au cours du mois de septembre, ainsi que des ateliers ou « Labs » initiés depuis le 5 juillet 2021 en vue de la transformation des chaînes de valeur agricoles. Je voudrais enfin ajouter qu’en vue de coordonner tout ce processus, il a été spécialement créé, au niveau de mon Cabinet, un « desk privé » chargé d’accompagner et de soutenir le développement du secteur privé. C’est vous dire tout l’intérêt que nous accordons au renforcement du partenariat entre l’État et ce secteur dans l’atteinte de nos objectifs.
Vous avez institué, les « travaux de laboratoires » ou « Labs » public-privé pour la résolution de certaines problématiques impactant l’activité économique. De façon concrète, comment se déroulent ces «Labs » ? Peut-on avoir une idée des problématiques qui sont examinées au cours de ces travaux ?
Ces « Labs » ont été lancés officiellement le 5 juillet 2021 et sont en voie d’achèvement. Les travaux en laboratoires ou « Labs » visent à définir, à travers la concertation entre les secteurs public et privé, les actions à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de la Vision Côte d’Ivoire 2030, notamment la transformation structurelle de l’économie ivoirienne. C’est un processus de rencontres techniques, d’échanges, de débats et de réflexions qui s’étendent sur plusieurs semaines. Typiquement, le processus des « Labs » démarre par un atelier technique d’appropriation de la Vision Côte d’Ivoire 2030, avec un nombre plus large d’acteurs et de faîtières que ceux présents lors du séminaire gouvernemental, en vue de s’approprier la Vision Côte d’Ivoire 2030, d’en discuter, et d’en explorer les réalités opérationnelles. Cet atelier est suivi de sessions techniques réunissant les mêmes acteurs avec pour but d’identifier les contraintes à la réalisation de la Vision Côte d’Ivoire 2030 dans leurs secteurs, de faire ressortir les causes profondes à la persistance de telles contraintes et, de dresser des programmes d’actions et de reformes aussi bien au niveau du secteur public que du secteur privé à mettre en œuvre pour le succès de la Vision. A titre d’illustration, le lundi 5 juillet 2021, j’ai tenu une rencontre de travail avec les acteurs des deux premières grappes prioritaires de notre stratégie : l’agriculture, les ressources animales et halieutiques et l’agro-industrie, et le coton, le textile, l’habillement. Il s’en est suivi, les 12 et 13 juillet 2021, un atelier élargi aux acteurs et aux faitières des filières pour leur donner l’occasion de s’approprier la Vision Côte d’Ivoire 2030. Enfin, du 22 juillet au 03 août 2021, se sont déroulés, les ateliers d’analyses des contraintes, des causes et des solutions pour l’amélioration de la production, de la productivité, de la transformation et de la commercialisation pour seize (16) filières agricoles prioritaires. Les travaux de validation des contraintes et des solutions en termes d’investissements et de réformes prioritaires sont en cours de finalisation. Ce processus aboutira par l’adoption en Conseil des Ministres des résultats des « Labs », incluant les investissements et réformes prioritaires en vue de l’opérationnalisation à partir de janvier 2022 du plan pour les deux premières grappes prioritaires sus citées. Ce même processus se poursuit sur l’ensemble des huit (8) grappes stratégiques de la Vision Côte d’Ivoire 2030, et aboutira d’ici décembre 2021 à la mise à disposition des plans opérationnels pour chacune de ces grappes. Il convient d’indiquer que les huit grappes concernées sont : « l’agriculture et l’agroalimentaire », « le textile et l’industrie de l’habillement », « l’habitat et les matériaux de construction », « l’éducation, la santé et l’assurance sociale », « les transports », « l’économie numérique », « le tourisme et l’hôtellerie » et « les arts et les industries culturelles et créatives ».
Pourrait-on avoir l’agenda du président du Conseil de Concertation concernant le dialogue État -Secteur Privé ? Quelles sont les grandes articulations de cet agenda ?
En notre qualité de Président du Conseil de Concertation (CC) État-Secteur Privé, notre mission consistera à donner un coup d’accélérateur au renforcement de ce dialogue sur la base des éléments que nous venons d’évoquer. Notre agenda s’articule dans ce cadre autour de deux axes principaux. Le premier axe porte sur le renforcement des acquis du dialogue avec le secteur privé par l’accélération des initiatives de l’État amorcées depuis 2012. Ce sont notamment : l’amélioration de l’environnement des affaires avec la poursuite des réformes au-delà du cadre du Doing Business en définissant ensemble des réformes dans le domaine de la justice, notamment dans la réduction des délais, la sécurisation foncière, la modernisation de l’administration, la lutte contre la fraude, et la lutte contre la corruption sous toutes ses formes… dont vous avez certainement commencé à en voir les effets. Nous travaillons de même, au renforcement du capital humain surtout en qualité notamment par une réforme du système éducatif, le renforcement de la formation professionnelle et l’amélioration des systèmes de santé et de protection sociale. Sans oublier l’amélioration de l’accès aux infrastructures et aux services sociaux de base pour appuyer la croissance économique du pays. A cela s’ajoute le renforcement de l’accès aux financements et aux marchés. Sur ce point, nous nous devons de devenir un État qui fait de sa diplomatie économique une force, qui prépare le chemin à ses Champions pour leur conquête à l’international. Cet axe appelle à la Mobilisation des Chambres Consulaires, le développement d’une Agence du Commerce Extérieur, pour les Marchés Régionaux et Internationaux. Le second axe repose sur une approche plus interventionniste de l’État en faveur du développement du secteur privé, car l’État ne peut plus rester spectateur et attendre que le secteur privé se débatte pour s’en sortir. L’assistance directe de l’État portera sur un ensemble de mesures visant à mettre en place une véritable fabrique de champions, pour le renforcement du tissu des PME. L’objectif étant de promouvoir l’émergence de PME fortes résilientes, par le coaching, l’accompagnement, le financement en capitalisant sur les Banques nationales, la CDC, les Fonds d’investissements publics, les Financements alternatifs, les Mécanismes de Garantie, et les expériences de pays de référence dans la convergence inter et intra cluster des PME. A cet effet, il sera lancé dans les prochains jours le Programme national des Champions Nationaux, les portes flambeaux de la stratégie Côte d’Ivoire 2030, au travers de qui, un accompagnement rapproché de la puissance publique sera mis en place au profit des géants ivoiriens. Les objectifs sont clairs, une contribution maximale au PIB, à la création d’emplois, mais aussi et surtout à la conquête de nouveaux marchés. Il sera également développé des initiatives en faveur de la construction d’écosystème d’affaires, dont l’objectif est de combler les défauts et insuffisances des grappes prioritaires par l’attraction ou la formation de nouveaux entrants, notamment des IDE, vers des groupes de PME ciblés. Et enfin, nous comptons renforcer le programme de migration des entreprises de l’informel vers le formel par des offres incitatives et une assistance pour leur survie. Cet ensemble de programmes, ou groupes de programmes, constituent l’épine dorsale de la stratégie Côte d’Ivoire 2030 et leur mise en œuvre nécessitera au-delà des sessions de « Labs » une plateforme permanente d’interaction continue avec le secteur privé.
Le titre est de la Rédaction